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L'enherbement des vergers |
Mais quels sont les impacts réels de l'enherbement sur les rendements, la qualité des produits et la rentabilité des exploitations ? Cette question est au cœur des débats actuels en agriculture.
Il est bien connu que l'herbe empêche l'érosion et diminue le tassement du sol sous l'effet des engins et du piétinement.
L'enherbement des vergers : un arme à double tranchant
L'enherbement des vergers présente à la fois des avantages et des inconvénients, selon les contextes spécifiques et les objectifs agricoles.
La question de l'enherbement : un choix stratégique pour l'agriculteur
Pour l'agriculteur, la question posée est simple : dois-je ou non détruire l'herbe dans les vergers ? Et dans l'affirmative, comment m'y prendrai-je ? La présence de l'herbe offre des avantages et des inconvénients qu'il convient d'étudier avant de raisonner sur l'opportunité de désherber.Les avantages de l'enherbement
Le principal avantage est son action protectrice et amélioratrice du sol.Il est bien connu que l'herbe empêche l'érosion et diminue le tassement du sol sous l'effet des engins et du piétinement.
Protection contre l'érosion et le tassement
La structure du sol est nettement améliorée. Cette amélioration est le résultat :- de la création d'agrégats au contact des racines
- du vide laissé par la racine d'herbe après sa disparition
- de la division du terrain par les animaux qui se nourrissent de matières organiques (il s'agit principalement des lombrics).
Amélioration de la structure du sol
Nous avons déjà vu dans l'étude sur les engrais verts que leur effet sur la structure est net mais de courte durée. Si on veut avoir un effet durable sur la structure, il faut avoir recours à l'enherbement permanent, et avoir la patience d'attendre plusieurs années. L'effet se manifeste surtout sur les 15 premiers centimètres du sol.Augmentation de la capacité de rétention en eau
L'herbe a un effet immédiat sur la perméabilité du terrain. Il n'y a pas de flaquage. La perméabilité est améliorée à tel point que dans les irrigations à plat, l'eau ne peut plus avancer sur de longues distances car elle s'infiltre au fur et à mesure.Les agriculteurs disent que l'herbe ralentit les irrigations. C'est vrai, mais en contrepartie l'herbe permet de stocker en profondeur des quantités d'eau plus importantes.
Enrichissement en matière organique et en éléments nutritifs
L'effet concurrentiel de l'herbe sur l'eau et les éléments fertilisants a parfois un côté bénéfique.L'effet "mèche" produit par les plantes qui transpirent, contribue à assécher le terrain en profondeur. Cette propriété peut être utilisée dans les zones très humides. Toutefois un bon drainage serait plus efficace.
L'absorption d'azote par l'herbe est intéressante dans le cas où cet élément est en excès et risque de disparaitre par lessivage. C'est quelquefois le cas en automne. Même au printemps, les élévations de température entrainent de fortes absorptions d'azote par l'arbre qui sont suivies de chutes de fruits. Il est reconnu partout que l'herbe amortit les pousses végétatives et réduit la chute de Juin.
Homogénéisation des éléments nutritifs du sol
Les éléments prélevés à un endroit du sol sont restitués en un autre point. L'herbe contribue donc à l'homogénéisation du sol. Mais l'homogénéisation se fait surtout en surface. On ne peut compter sur l'herbe pour transporter en profondeur les engrais abondants dans les couches superficielles.Les éléments prélevés sous forme minérale sont restitués sous une forme organique, particulièrement intéressante dans le cas des carences. Il a été remarqué que l'enherbement augmentait la teneur des feuilles en bore et en zinc. La teneur en fer et manganèse est également améliorée en terrain sableux, mais ce serait le contraire en terrain argileux.
Augmentation de la CEC du sol
L'enherbement par l'humus qu'il laisse augmente la capacité d'échange d'un sol. Cette propriété est très intéressante dans les sols complétement dépourvus d'argile, dont le seul pouvoir absorbant est constitué par l'humus.Protection contre les gelées printanières
L'enherbement modifie l'atmosphère au-dessus du sol. L'abaissement de température qui aggrave le risque de gel, a au contraire une influence favorable sur la coloration.
Réduction de l'évapotranspiration en période de sécheresse
L'ambiance humide, qui est un désavantage en hiver, devient au contraire un avantage en été. C'est le seul moyen de lutte efficace contre les effets du chergui (vent chaud).Favorisation de la biodiversité
Si l'herbe peut favoriser certains ravageurs, elle favorise encore plus les prédateurs, et notamment les syrphes, qui sont à certaines époques capables de neutraliser à eux seuls des attaques de pucerons.L'herbe permet aux racines d'exister en surface. Nous avons vu qu'il y a un risque de sécheresse. Mais en surface les racines trouvent en général une alimentation abondante.
Les inconvénients de l'enherbement
Le principal reproche que l'on fait à l'herbe est la concurrence qu'elle exerce pour l'eau et la nourriture.
La présence de l'herbe freine indubitablement la végétation, ce qui se traduit par des récoltes plus faibles et des calibres plus petits.
La concurrence est plus nette au niveau de l'azote, ainsi que le révèle l'analyse foliaire. Pour la nutrition phosphatée et potassique, les résultats sont contradictoires. Le sucre et l'acidité baissent.
L'impact des mauvaises herbes sur les jeunes plantations
L'effet néfaste de l'herbe a des conséquences d'autant plus importantes que les arbres sont jeunes au moment où s'exerce la concurrence. Cet effet dépressif peut se faire sentir pendant plusieurs années après que la concurrence de l'herbe ait été limitée.
On peut se demander si en mettant plus d'eau et de fumure, surtout azotée, on n'arriverait pas à surmonter cette concurrence. Des résultats positifs ont effectivement été obtenus.
On a souvent constaté que le retard des parcelles enherbées sur celles cultivées diminuait avec le temps. On suppose :
On peut se demander si en mettant plus d'eau et de fumure, surtout azotée, on n'arriverait pas à surmonter cette concurrence. Des résultats positifs ont effectivement été obtenus.
La voracité des mauvaises herbes
Mais cela n'a pas toujours été le cas même avec des doses supplémentaires de N de 100 U, car les racines des herbes annuelles sont beaucoup plus voraces que celles des arbres, et ce sont elles qui bénéficient des suppléments de fumure.On a souvent constaté que le retard des parcelles enherbées sur celles cultivées diminuait avec le temps. On suppose :
- d'une part que l'arbre bénéficie d'une structure améliorée
- d'autre part, que les restitutions des herbes mortes compensent les prélèvements des pousses d'herbes annuelles.
Sensibilité à la sécheresse
On sait que le terme "évapotranspiration" rend compte des pertes d'eau d'un sol. En gros, la fraction "évaporation" est celle évaporée directement par le sol à partir de sa surface, tandis que la fraction "transpiration" est celle qui est rejetée dans l'atmosphère par le végétal, qui prélève cette eau par ses racines, donc en sous-sol.La présence du végétal par l'ombre qu'il fait sur le sol, diminue la fraction "évaporation" mais augmente la fraction "transpiration". Par temps froid au début du printemps, ces deux phénomènes se compensent. On a même l'impression que l'herbe "conserve" l'humidité, puisque la surface du sol enherbé est plus humide. Mais ce n'est qu'une impression car en réalité, il est plus sec en profondeur.
Par temps chaud, la transpiration augmente beaucoup plus vite que l'évaporation et le sol se dessèche, mais surtout en profondeur. C'est ce que 1'on appelle l'effet "mèche" des racines.
L’effet des toxine des mauvaises herbes
Le fait que des suppléments d'eau et d'engrais n'ont pas toujours pu maintenir les parcelles enherbées au niveau de celles du sol nu travaillé peut aussi s'expliquer par l'effet des toxines émises par les herbes.Bien que peu de travaux aient été menés à ce sujet, le fait est connu depuis longtemps.
Il faut dire que l'expérimentation est malaisée, car il est difficile en plein champ de séparer l'effet toxines de l'effet concurrence pour l'eau et les éléments fertilisants.
L'effet toxines joue probablement beaucoup dans le cas du chiendent et du Cypérus car il est d'observation courante que ces plantes éliminent les autres.
L'effet de la remontée des racines de la culture vers la surface
L'herbe permet la remontée des racines vers la surface. C'est un avantage dans la mesure où la surface est plus riche et plus chaude mais c'est un inconvénient parce que cette zone superficielle est plus soumise aux accidents de sécheresse.Effet sur la température de l’air
Effet sur la température de l'air Il est bien connu que la présence de l'herbe constitue un isolant entre le sol et l'air. Ces calories qui remontent du sol ne sont pas retransmises à l'atmosphère. Il s'ensuit que la température nocturne est plus basse de 1 à 2°, ce qui peut être catastrophique en cas de gel dû à un abaissement de température par radiation.Hébergement de certains ravageurs (pucerons, escargots)
L'herbe maintient une ambiance humide dans le verger, ce qui est nuisible quand on est aux prises avec des problèmes de bactéries ou de champignons.Une question très discutée est de savoir si l'herbe a une influence nocive par les ravageurs qu'elle héberge.
Cette influence défavorable ne peut porter que sur des ravageurs communs aux herbes et aux arbres. Le nombre en est limité.
Des découvertes extrêmement récentes ont montré que les virus et les mycoplasmes pouvaient être hébergés par des plantes herbacées. Ceci serait extrêmement grave dans le cas du Stubborn, qui pourrait être transmis des herbes aux arbres.